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Edito

Christian LAVAL

Année de publication : 2008

Type de ressources : Rhizome - Thématique : Psychiatrie, SANTE MENTALE, SCIENCES HUMAINES, SCIENCES MEDICALES, Sociologie

Télécharger l'article en PDFRhizome n°30 – Traverser la confusion (Mars 2008)

Un mouvement de désorientation chemine de longue date dans la communauté  psychiatrique. Pris dans des assignations contraires, pressés par des logiques administratives et budgétaires, coincés dans des programmes qui oublient l’humain, partagés entre acte médical et action sociale, les praticiens témoignent, dans ce numéro, d’un quotidien de pratique éminemment contrariant. Aujourd’hui pour se pencher auprès d’un patient (« cliniquer »), il faut considérer la provenance du malade et, presque la première consultation, envisager les relais,  prendre en compte les crédits de l’hôpital (qui paie quoi ?), la division du travail (qui fait quoi ?), etc…

Encore une énième tranche de plainte, diront, un peu agacés, les plus critiques. Oui et non.

Oui, car la blessure sur l’identité professionnelle, le désarroi et la peur d’y perdre son âme, sont bien présents. Ainsi peut-on lire ce Rhizome comme une contribution subjective sur le moral des troupes.

Non, car réduire la lecture à la mesure de la plainte serait un peu court. Sommes-nous toujours des médecins ? La question est posée sérieusement dans un contexte où le maître mot de la situation n’est pas celui de souffrance ou d’usure professionnelle, mais celui de la triple confusion : des savoirs, des places et des missions.

Cette confusion démultipliée doit être comprise comme un indice de désordre, de dérangement mais aussi de bouleversement consécutif à l’immersion prolongée des praticiens dans l’ère des réseaux. Les professionnels qui travaillent au cœur des réseaux (soin/pénal ou soin/social), décrivent objectivement des logiques organisatrices…de confusion à différents niveaux dont ils commencent à  mieux discerner les effets  iatrogènes et  parfois délétères sur l’idée qu’ils se font de leur métier. Dire la confusion permet d’exprimer le fait que la    psychiatrie, ces derniers temps, en « a pris un sacré coup ». La clinique en situation de précarité est aussi une clinique précarisée. Lorsque les interpellations et les demandes (du politique et des opinions publiques) se démultiplient tous azimuts, une exigence de clarification apparaît alors comme l’urgence du moment. Les professionnels ne veulent pas devenir  une variable d’ajustement des politiques pénales ou sociales. Il faut entendre cet avertissement. Pour eux, il s’agit de traverser la confusion afin de sauvegarder une ligne de conduite et d’action, une éthique de la situation qui fasse barrage à ce qu’ils considèrent comme inacceptable et impraticable quel que soit le contexte « global ».

La matière première du soin psychique, c’est le temps. Mais tenir à la fois le temps transitionnel de la clinique, celui de l’indétermination et de la conflictualité des assignations contradictoires, oblige à une résolution réaffirmée et managée collectivement, pour ne pas avoir à se plier aux demandes indéfinies des pouvoirs, sans revenir pour autant aux pratiques de cloisonnement.

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