Le Vinatier, un territoire hospitalier en mouvement

Affiche de l’exposition

A l’occasion des Journées Européennes du Patrimoine explorant en 2007 la thématique « Patrimoine et Santé », la Ferme du Vinatier a proposé une exposition du 15 septembre au 16 décembre 2007 qui retraçait les évolutions de son territoire depuis sa création en 1876 jusqu’à… 2026.

Les visiteurs ont été invités à découvrir les transformations qui ont conduit l’asile départemental d’aliénés du XIXème siècle à devenir un Centre hospitalier moderne, témoignant du lien indéfectible entre conception clinique et production de l’espace.

Cette exposition interrogeait les nouvelles logiques de production et d’organisation de l’espace qui vont émerger en parcourant le vécu territorial de l’hôpital de sa création jusqu’à son devenir…en 2026.

Introduction

Vue aérienne du VinatierCopyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

L'histoire de l'hôpital met en exergue l'oscillation de la psychiatrie entre deux projets cliniques régulièrement mis en tension et se traduisant par deux modèles spatiaux : le village et l'archipel. Aujourd'hui, ces deux conceptions ne sont plus concurrentes mais complémentaires pour une prise en charge complète et continue de la personne malade. Une continuité est recherchée entre la séquence d'hospitalisation complète et le suivi ambulatoire qui permet de sortir de l'opposition entre fermeture et ouverture.

A cet égard, les documents cadres de la politique de santé mentale insistent tous sur l'amélioration de la filière de soin qui consiste à penser ensemble la prévention, la prise en charge et la réinsertion des personnes. Si cette préoccupation a toujours été présente pour les professionnels dans la philosophie du Secteur, elle semble être désormais au cœur du projet de santé mentale des années à venir. Il nous appartient donc de nous interroger sur les nouvelles logiques de production et d'organisation de l'espace qui vont émerger de cette vision du soin.

Le transfert des aliénés de l'Antiquaille à l'Asile de Bron, 1876

La rotonde de l’Antiquaille, Hospice civils de Lyon, 19eme siècleCopyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

L'aliéniste catholique lyonnais Joseph Arthaud (1813-1883) a été interne, adjoint, puis médecin chef du quartier d'aliénés de l'hospice de l'Antiquaille. Il est témoin durant trente ans de l'encombrement progressif du quartier d'aliénés de cet établissement. 

L'augmentation croissante du nombre de lits et de bâtiment consacrés aux aliénés, à l'Antiquaille comme dans tous les asiles de France, effraye beaucoup d'aliénistes. Depuis le programme national d'asiles départementaux projeté par Jean-Etienne Esquirol dès les années 1820, entériné véritablement par la loi de 1838 sur l'internement, le service d'inspection générale des asiles de France que dirige Max Parchappe recommande de vastes établissements où circulent l'air et la lumière, loin de l'insalubrité et de l'agitation des villes.

Le site de l'Antiquaille ne permet pas le déploiement d'un tel établissement. Il faut trente ans de tergiversations pour que s'ouvre enfin en 1876 un asile sur le site de Bron, dans une ambiance très conflictuelle entre les Hospices Civils et le Conseil Général qui devient gestionnaire de l'établissement. Joseph Arthaud en est le premier médecin directeur.

Devant la situation intolérable à l'hospice de l'Antiquaille et malgré l'inachèvement de l'asile, l'ensemble des aliénés hommes et femmes est donc transféré entre août et décembre 1876 à Bron. L'évacuation de 900 personnes nécessite de nombreux voyages ; un omnibus effectue spécialement des rotations entre l'Antiquaille et l'asile départemental, traversant le centre ville.

Maquette de l’architecte Jean-Louis Bouchard. Évocation du transfert des aliénés depuis L’ Antiquaille vers Le Vinatier en 1876Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

 " Au début, le transfèrement à Bron s'est fait dans la voiture de l'asile, puis dans un grand omnibus frété à cet effet. Les escouades, formées d'abord de six malades, ensuite de douze, étaient surveillées, celles des hommes, par deux gardiens, et celles des femmes, par deux religieuses de l'asile.

Les malades étaient classés comme dans les divisions de l'Antiquaille, afin que ceux qui avaient l'habitude de vivre ensemble ne fussent point séparés. Tant qu'a duré l'opération, une grande partie de ma visite a été employée à préparer les aliénés à cette émigration et à leur démontrer qu'ils seraient traités aussi paternellement à Bron qu'à l'Antiquaille. "On sait ce qu'on a, me répondit tristement une pauvre folle depuis longtemps internée, on ne sait ce qu'on aura." L'ordre et même le silence ne cessèrent de régner dans ces nombreux voyages renouvelés deux fois par jour ; et, quoiqu'il fallût traverser Bellecour et la Guillotière, la qualité des émigrants parut le plus souvent ignorée. (...)

Maquette de l’architecte Jean-Louis Bouchard. Évocation du transfert des aliénés depuis L’ Antiquaille vers Le Vinatier en 1876Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

J'ai entendu dire que des hommes qui se disent économistes et qui ne sont qu'économes, car ils ne considèrent les aliénés que comme des entités budgétaires, avaient trouvé trop lente cette  translation de plus de neuf cents personnes et estimaient qu'elle aurait pu être exécutée avec moins d'atermoiements. Soit ; mais pour les aliénistes, les fous sont autre chose que des chiffres ; ce sont des privilégiés, parce qu'ils sont déshérités, des mineurs qui ont besoin d'être protégés, éclairés et guidés ; et bien que la maladie ait produit chez eux une perturbation souvent profonde des caractères, des affections et des sentiments, ils n'en restent pas moins extrêmement sensibles aux bons procédés, ils ne sont point, comme on le croit, séparés de la vie réelle ; il n'y a que les déments dont toutes les idées soient confondues."

Antoine Lacour (1817-1909), Le transfert des aliénés du quartier de l'Antiquaille, 1876

Maquette de l’architecte Jean-Louis Bouchard. Évocation du transfert des aliénés depuis L’ Antiquaille vers Le Vinatier en 1876Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

L' Asile de Bron, un outil rationnel et thérapeutique

Le 30 juin 1838, le gouvernement adopte une loi qui fait obligation aux départements de se doter d'un établissement spécifiquement consacré à l'accueil et au soin des aliénés. Le mas des Tours, situé sur la commune rurale de Bron, est acquis en 1868 par le Conseil Général du Rhône. Situé à la périphérie de Lyon, le terrain offre l'avantage d'un contact avec la nature, jugé indispensable à la guérison des aliénés.

Joseph Arthaud collabore avec l'architecte départemental Antonin Louvier et l'inspecteur général Constans. Il veille à organiser le plan architectural comme un outil thérapeutique majeur. Implanté sur 37 hectares d'un terrain qui offre " salubrité, isolement, tranquillité et vaste espace ", les locaux sont organisés selon une ségrégation par sexe et une classification nosographique;

Plan Général de l’asile, cahier de plans d’origine par l’architecte départemental, Antonin Louvier, 1876Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

L'asile dispose de neuf quartiers pavillonnaires pour chaque sexe, ordonnés en deux U parfaitement symétriques. Ces pavillons sont attribués par catégories de malades établies à partir du degré d'agitation. Des pensionnats payants sont prévus pour les malades plus aisés, à l'écart de l'asile central. Enfin, la chapelle, épicentre de l'hôpital, est située sur l'axe de symétrie qui matérialise alors la séparation géographique par sexe des malades.

Pour faire face à l'accueil d'un nombre croissant d'internés (les effectifs passent de 998 en 1876 à 1600 en 1900), les autorités doivent acquérir des terres supplémentaires, l'assise foncière de l'établissement atteint alors une superficie de 112 hectares. Le territoire est réparti en trois espaces à l'usage très différencié : un espace à vocation thérapeutique, un espace à vocation économique et un espace à vocation agricole.

La chapelle, cahier de plans d’origine par l’architecte départemental, Antonin Louvier, 1876Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

" Une maison d'aliénés est un instrument de guérison; entre les mains d'un médecin habile, c'est l'agent thérapeutique le plus puissant contre les maladies mentales. "

Docteur J-E-D Esquirol (1772-1840) Citation de 1818.

L'échec de l'Asile, 1946

Carte postale, BRON - VILLAGE - Entrée de l'Asile et en arrière plan : la chapelle - 1900-1913Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

L'urbanisme de l'asile de Bron fait écho au genre utopiste autant par l'organisation symétrique et circulaire de son espace que par la volonté d'intégrer le travail de la terre et le rythme des saisons. Des règles strictes et répétitives président au quotidien de la collectivité.

Pendant 70 ans, l'asile est un monde clos pour les malades comme pour les soignants. Les malades y entrent pour souvent n'en plus sortir. Vivant en quasi-autarcie, comme l'atteste la présence d'un grand nombre de corps de métiers, les membres du personnel s'inscrivent dans un tissu relationnel extrêmement serré et dominé par les valeurs de solidarité et de convivialité.

Carte postale Asile de BRON (Rhône) - Jardin, 2° et 3° division 1900-1913Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

Cependant, la description de l'organisation de la vie quotidienne dans cet espace clos révèle un mode de fonctionnement carcéral. La rigueur des règles de vie collective, la stigmatisation des malades, la relégation de l'hôpital transforment peu à peu l'asile de Bron en un lieu d'oubli duquel se retirent les notions élémentaires d'humanité. Configuration spatiale, surpopulation asilaire, rationalisation excessive mettent en relief les limites de l'asile - village.

Carte postale Asile de BRON (Rhône) - Entrée de l'avenue, 1900-1913Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

La question de la surpopulation et de la paupérisation de l'asile atteint son paroxysme à la veille de la seconde guerre mondiale. Pendant cette période, les malades subissent de plein fouet les restrictions alimentaires et meurent de faim et de froid dans une indifférence quasi-générale. L'asile est plus que jamais retranché derrière ses hauts murs et sa misère.

Un élan de modernisation de la psychiatrie, 1966

Graffiti années 1970Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

A partir des années cinquante, le modèle asilaire a été radicalement remis en cause, marquant le début de la psychothérapie institutionnelle (circulaire ministérielle en 1952 ordonnant "l'humanisation" des hôpitaux psychiatriques, mise en place d'ateliers d'ergothérapie et développement de la sociothérapie).

Cette vague d'innovations est amplifiée par les effets du progrès médical, notamment par l'arrivée à l'hôpital du premier neuroleptique, le Largactil. Portés par la vague libertaire de 1968, puis interpellés par les positions virulentes d'une antipsychiatrie marquée par le mouvement italien, les personnels du Vinatier remettent en cause l'organisation autarcique de l'hôpital.

Randonnée, Gresse-en-Vercors, 1982Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

En 1960 une circulaire ministérielle institue le secteur en psychiatrie : chaque service de psychiatrie d'environ 200 lits doit couvrir les besoins d'une population de 66 000 personnes en s'appuyant sur des structures à l'extérieur de l'hôpital. Mais dans les douze années suivantes, la mise en place de la sectorisation se heurte à des résistances psychologiques et de nombreuses difficultés administratives.

C'est seulement en 1973 qu'un nouveau plan global de sectorisation, intégrant la récente mixité sexuelle dans les services, est réellement concrétisé. Les équipes psychiatriques, devenues pluridisciplinaires, élargissent leur mission à la réadaptation, au suivi des familles, à la réinsertion sociale et économique. Depuis, les personnes sont soignées au plus près de leur domicile au sein de leur environnement social grâce à une soixantaine de structures de soin extra muros, auxquelles il faut ajouter les appartements thérapeutiques et autres formes d'accompagnements individuels en milieu ouvert.

Mur peint et gravéCopyright : Fonds : la Ferme du Vinatier

" [Il convient d'] examiner la place que doit prendre l'établissement psychiatrique existant dans l'organisation départementale de la lutte contre les maladies mentales et à déterminer les répercussions éventuelles que les mesures adoptées entraîneront, tant sur le  fonctionnement de l'établissement que sur l'équipement du département en matière de lit pour malades mentaux. Les buts à atteindre sont les suivants :

Graffiti années 1970Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

1. Entreprendre les soins des malades mentaux à un stade plus précoce, avec de plus grandes chances de succès, et apporter aux anciens malades un appui médico-social efficace leur évitant des récidives. Cette conception entraîne la nécessité de confier à la même équipe médico-sociale la charge du malade en cure hospitalière et en pré- et postcure. Il est, en effet, indispensable que le malade sorti de l'hôpital psychiatrique retrouve au dispensaire, au foyer de postcure, le médecin qui l'a traité à l'hôpital psychiatrique. C'est la condition même pour qu'il accepte cette postcure. Par ailleurs, nul plus que le médecin de l'hôpital psychiatrique n'est intéressé au but poursuivi qui est d'éviter des hospitalisations inutiles (…)"

Extrait de la circulaire de 1960, chapitre III Organisation du dispositif de lutte contre les maladies mentales

Graffiti années 1970Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

"2. Éviter la désadaptation qu'entraîne l'éloignement du malade de son milieu naturel. Il est donc nécessaire que les établissements, qu'il s'agisse de l'hôpital psychiatrique, de l'hôpital de jour ou du foyer de postcure, soient facilement accessibles pour la population qu'ils desservent. Pour atteindre ces buts, l'établissement psychiatrique doit desservir désormais une aire géographique bien délimitée et proportionnée à son importance, appelée Secteur. (...) La notion d'établissement ou de service pour un seul sexe ne peut être maintenue dans ce cadre. (...) Dans cette organisation, le médecin du service d'hospitalisation qui assure les consultations d'hygiène mentale et prend en charge des organismes extrahospitaliers visés au chapitre II, travaille également avec le personnel propre au service (assistantes sociales, psychologues, secrétaires, etc). La caractéristique de la politique de secteur est que chaque membre de l'équipe extra ou intrahospitalière a des contacts quasi journaliers avec tous les autres. Ainsi est réalisée de la façon la plus satisfaisante la continuité des soins ; chaque fois que cela est possible, l'hospitalisation ou la réhospitalisation est évitée ; l'insertion ou la réinsertion du malade est faite dans les meilleurs conditions, grâce à la connaissance que l'équipe médico-sociale a pu acquérir, non seulement du malade, mais encore du milieu économique et social du secteur et, notamment, des ressources de logement et des diverses possibilités d'emploi qu'il offre."

Extrait de la circulaire de 1960, chapitre III Organisation du dispositif de lutte contre les maladies mentales.

Graffiti années 1970Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

Un territoire hospitalier devenu illisible, 2006

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Coline Rogé

L'hôpital psychiatrique contemporain se caractérise donc par la diversité des prises en charge et des alternatives à l'hospitalisation. Aujourd'hui encore le Secteur continue à s'enrichir de nouvelles structures extra-muros.Ce déploiement des moyens vers l'extérieur a été corollaire sur le territoire historique de l'hôpital de la fermeture massive des lits d'hospitalisation et de la modernisation des bâtiments. Or, les pavillons anciens ne pouvaient pas toujours répondre aux normes en vigueur. De nouveaux locaux ont alors été construits dans les trente dernières années sur l'ensemble du territoire.

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Magali Thollet

Le centre historique s'est vidé de ses activités cliniques et les unités de soin se sont disséminées à la lisière du périmètre hospitalier. Le bel ordonnancement de la conception initiale de l'hôpital psychiatrique a fait place à un parc diffus parsemé de locaux cliniques, logistiques et administratifs, implantés ça et là au fur et à mesure des besoins, dont la logique est devenue illisible. En outre, à la dissémination des pavillons se sont ajoutés les effets des efforts d'ouverture de l'hôpital pour mettre fin à sa stigmatisation. De fait, la fréquentation du parc de l'hôpital par les riverains a accentué la confusion concernant son statut et ses usages. A l'heure où les services de soin sont conduits à se regrouper en pôles d'activité clinique, l'éclatement des structures devient incompatible avec les nouvelles modalités d'organisation de l'hospitalisation.

Un territoire hospitalier convoité, 2006

Séquoias dans la cours de Flavigny, Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Copyright : Mairot Paulette

Pendant l'entre-deux-guerres, l'urbanisation rattrape progressivement l'asile avec l'ouverture de la faculté de médecine, de l'hôpital de Grange Blanche, la construction du quartier Laënnec… Le territoire de l'hôpital - devenu une véritable réserve foncière - doit faire face à de fortes pressions. Le phénomène s'amplifie à partir des années 50. L'hôpital se trouve désormais en plein cœur d'une zone d'urbanisation rapide, la commune de Bron intégrant la banlieue de Lyon. En 1960, le don d'un immeuble par les Hospices Civils de Lyon au Vinatier, en échange d'une parcelle de terrain pour construire l'hôpital neurologique, est une opportunité pour créer le premier Centre Médico-Psychologique, cours Lafayette. C'est également la première cession de terrain.

Planche des plans « La ville autour de l’hôpital, approche globale du territoire »Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

En 1969, l'inauguration de l'hôpital cardio-pneumo oblige l'hôpital à fermer son cimetière. Par la suite l'élargissement du boulevard Pinel, la construction du petit complexe du cyclotron et plus récemment la construction du tramway et la mise en chantier du nouvel hôpital mère/enfants des HCL entraînent successivement la cession de nouvelles parcelles, si bien que la superficie de l'hôpital est actuellement réduite à 74 hectares (soit une diminution de 38 hectares). L'intensification des sollicitations dans l'avenir ne fait aucun doute. La manière la plus constructive pour l'hôpital de préserver l'intégrité de son patrimoine et de maîtriser son développement est d'élaborer et de porter un projet pour son devenir.

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Rocher Valentin

Un territoire hospitalier devenu inadapté, 2006

Le mitage progressif de son espace a généré un dysfonctionnement global de circulations entre les différents pavillons essaimés sur les 74 hectares.

La politique d'ouverture du parc aux visiteurs a produit des effets problématiques en ne garantissant plus aux malades et aux soignants les lieux d'intimité et de pudeur indispensables à la reconstruction psychique. Les usages de l'espace hospitalier sont désormais indifférenciés - rollers, vélos, poussettes, patients, familles, malades, étudiants, visiteurs, publics, artistes… - aux dépens des bénéficiaires du soin.

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Beaumont

Par ailleurs, l'élargissement de l'aire métropolitaine positionne Le Vinatier au centre d'une dynamique urbaine et non plus à sa marge. Sa ressource foncière devient un bien convoité dont il souhaite conserver la maîtrise et le choix de ses partenaires.

D'autant que l'attachement de ses personnels à l'intégrité du territoire est viscéral. Enfin, les réformes hospitalières majeures et l'évolution rapide du secteur de la Santé mentale mettent Le Vinatier en demeure d'adapter son outil spatial aux nouvelles modalités du soin.

Le Centre hospitalier Le Vinatier engage donc en 2006 la définition d'un nouveau projet directeur d'urbanisme et de paysage pour son territoire.

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Duvillet Marie-Christine

Des valeurs à ré-affirmer

Un travail collectif de quinze mois associant toutes les composantes de l'hôpital a fait émerger les aspirations des personnels pour leur territoire. Elles se sont traduites par neuf mots - valeurs qui s'imposent comme un véritable cahier des charges pour le projet d'urbanisme et de paysage. Ils sont : Soignant, l'espace et l'architecture restent des moyens thérapeutiques. Sécurité, la psychiatrie a toujours été confrontée à une double problématique de sécurité : protéger le citoyen des accès de folie d'une minorité de maladeset protéger les malades de certains comportements des riverains. Différenciation, la psychose étant un facteur de confusion mentale, il est ici plus qu'ailleurs nécessaire de différencier les espaces au regard de leurs usages et de leurs fonctions.

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Onanachvili Sabine

Graduation, ni fermeture, ni ouverture, il est nécessaire de définir des espaces gradués dans leur qualité de protection et de mise en relation avec autrui. Hospitalité, l'esprit de l'hôpital n'est pas celui d'une forteresse, il pratique une hospitalité dans les domaines de l'enseignement, de la recherche, de la culture. Accessibilité, l'accès doit être lisible pour chacun et permettre de rejoindre sans effort tous les services hospitaliers. Qualité, il s'agit de restituer à ce lieu une qualité environnementale pour les usagers en y intégrant les normes écologiques d'aujourd'hui. Communication, la présence de sas compris comme des lieux de partage entre différentes catégories d'usagers est indispensable pour faire contrepoids à l'atomisation. Convivialité, avoir accès à un journal, à de la petite alimentation, à un bar, à une boulangerie est aujourd'hui une exigence de base pour tout consommateur et participe à la convivialité de la vie sociale d'un site.

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Justet Christiane

Planche des plans "Construction du projet"Copyright : Fonds : La Ferme du Vinatier

Le territoire hospitalier, 2026

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : De Chabert France

S'inspirant des valeurs exprimées par les personnels de l'hôpital, l'Atelier des paysages a dessiné à grands traits le projet d'urbanisme et de paysage du Vinatier pour les deux décennies à venir.  Il se caractérise par la différenciation de trois espaces identitaires :

un espace clinique réservé au soin, un espace de rencontre accueillant la vie institutionnelle et les activités ouvertes sur la ville, un espace vert- limite avec la Ville.

La graduation des circulations entre ces différents espaces se fait par un travail fin sur les limites allant du plus fermé (le pavillon médical et son jardin privatif) au plus ouvert (la limite entre la Ville et l'espace de rencontre).

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : Mr Atrops

La réorganisation des pôles d'activité clinique, technique et administrative est pensée dans un souci de mutualisation des moyens, donc des espaces (nouvelle gouvernance hospitalière).

L'amélioration de l'accessibilité se concrétise en aménageant de nouveaux accès directs, en particulier avec le Boulevard Laurent Bonnevay pour les automobiles et avec le tramway pour les piétons. L'aménagement global du site se fera selon les critères du développement durable tant du point de vue des circulations, que de la gestion des eaux et de l'énergie, que des normes de construction architecturale. Enfin, une attention sera portée au développement et à la maîtrise des interactions avec son environnement : les HCL au nord, Bron à l'est et au sud, Lyon à l'ouest. Un dialogue avec le Grand Lyon accompagnera cette phase de mutation.

Clichés sélectionnés dans le cadre du concours photographique "lieu commun, lieux singuliers" CH Le Vinatier, Juin 2006Auteur : François Starita

Générique

  • Une exposition conçue et réalisée par LA FERME DU VINATIER - CH LE VINATIER :
    • Carine Delanoë-Vieux : Direction, scénario - Direction associée patrimoine, culture et prospective
    • Isabelle Bégou : Chef de projet
    • Juliette Pégon : Médiation culturelle
    • Coline Rogé : Communication - Presse
    • Marie-Jo Barny de Romanet : Administration
    • Isabelle Buendia : Accueil
    • Jean-Louis Bouchard, architecte,
    • Marion Bochirol, assistante et Laëtitia Burlot, stagiaire : Scénographie et maquette  historique.
    • Alain Marguerit, urbaniste paysagiste, Atelier des paysages : Projet Urbanisme et Paysage et plans
    • Jean-Lou Rouet, maquettiste, Atelier Maquette
    • Prototype Méditerranée : Maquette projet urbanisme

    • Remerciements :
    • Séverine Peruzzo, documentation,
    • les agents du Pôle Prestataire de service et les membres  de la commission urbanisme

    • Avec le soutien :
      du ministère de la Culture,
      Drac Rhône-Alpes,
      de l'Agence Régionale de l'Hospitalisation Rhône-Alpes,
      de la Région Rhône-Alpes,
      du Département du Rhône,
      de la Ville de Bron.

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